Sarah Tritz, Capriccio cherche comtesse
- Vue de l’exposition de Sarah Tritz « Capriccio cherche comtesse », Bétonsalon - Centre d’art et de recherche, Paris, 2008. Image : Aurélien Mole
Exposition réalisée en partenariat avec Leroy Merlin
Dans une volonté d’inscrire Bétonsalon dans son contexte avec des projets tenant compte de la situation géographique de l’espace situé au coeur d’un quartier reconstruit encore en travaux mêlant architecture industrielle, habitats et commerces, l’artiste plasticienne Sarah Tritz travaillera pendant quinze jours sur place à la réalisation d’une oeuvre d’art composée, entre autres matériaux, de parpaings et de briques.
Le temps de l’exposition sera l’occasion d’habiter cette œuvre par le biais de différentes activités (ateliers, visites commentées ou performées, concerts…). Sarah Tritz a notamment été invitée à programmer un cycle de “Rendez-vous”, l’occasion de convier quelques auteurs dont les pratiques permettront d’apporter plusieurs éclairages sur son travail. Il s’agit aussi d’encourager l’émergence d’une jeune scène française d’auteurs et compositeurs qui proposeront des interventions originales spécifiquement conçues pour l’occasion.
Sarah Tritz est née en 1980. Elle vit et travaille à Paris. Elle a récemment exposé son travail à la Maison du livre, de l’image et du son (Villeurbanne, 2008), à La Suite (Château-Thierry, 2007) ou à La Station (Nice, 2006) dans le cadre d’expositions collectives. Une exposition personnelle, Un Joyeux Naufrage ! lui a été consacrée en 2007 à l’Espace d’Art Contemporain Camille Lambert de Juvisy-sur-Orge. Sarah Tritz vient de réaliser une résidence à Berlin chez ‘Visite ma tente’, résidence fondée par SMP (Marseille). Capricciocherche comtesse est sa première exposition personnelle à Paris.
- Vue de l’exposition de Sarah Tritz « Capriccio cherche comtesse », Bétonsalon - Centre d’art et de recherche, Paris, 2008. Image : Aurélien Mole
Les pièces de Sarah Tritz se présentent comme des ensembles composites travaillés par un rythme inédit qui à chaque fois leur est propre. Ce rythme, proche de l’humeur, telle une musique intérieure, vient organiser du dedans tout un jeu de formes qui, sitôt sorties de cette organisation bricolée, retourneraient à leur indistinction initiale. Du dehors, l’ensemble peine à s’accorder, rien ne bouge. La vision hésite, on bute, on s’étonne de certaines affinités présumées. Des éléments semblent même jurer.
Du dedans, ils prennent tous place. Une circulation s’impose, le regard trace son chemin et des liens s’animent. Nous sommes invités à éprouver.
C’est que l’ensemble fonctionne de manière organique. Le moteur de ce grand déploiement du vivant est l’imagination. Une imagination épaulée par une volonté d’ordonner. La matière, c’est-à-dire ce qui reste des expériences passées, se compose de toutes sortes de documents, autobiographiques ou fictionnels, c’est selon, et d’objets trouvés, modifiés, fabriqués. Cette matière première mijote quotidiennement pour ensuite être construite et reconstruite au gré des installations nouvellement
présentées. Donner forme à la vie, à sa vie, est une tâche qu’il faut toujours recommencer. En ce sens, on assiste à un déploiement en perpétuelle expansion qui met en branle un réseau dynamique entre un rapport affectif au monde et une exacerbation du ressenti traduit par des formes naviguant sans cesse entre une apparition plate et bidimensionnelle, entièrement vouées à la vue, et la recherche d’une plasticité dédiée au toucher, le tout pris dans un effort de combinaison afin que l’ensemble tienne debout. Les choses se figent. De ce tout, émerge alors à une invitation à réanimer ce jeu de formes qui nous apparaissent de fait comme « à demi mortes ». Après la toute puissance créatrice du jeu, on en appelle à l’autre. Sans cela, rien n’existerait.
Il faut prendre Sarah Tritz au mot. Et le titre l’annonce : elle se place sous le signe du caprice. Qu’est-ce à dire ? Le caprice, ou capriccio, désigne un genre pictural que l’on rattache habituellement au rococo, et dont la particularité est de présenter des paysages parsemés de ruines. Ces ruines sont pour la plupart inventées, tronquées et combinées selon les besoins de composition du tableau, ou simplement reprises d’édifices existants mais toujours replacées dans un contexte de fiction cultivant le goût du bizarre, des associations étranges et fantasques. Finalement, sont toujours peintes des architectures imaginaires. Au premier abord, on croit y voir une ode au passé. Très vite, c’est le sentiment historique qui prédomine, les événements sont filtrés et reformés par l’artiste dont les procédés de transformation n’appartiennent qu’à sa fantaisie. Il semblerait que Sarah Tritz partage quelque air de famille avec le caprice. Mais ne voyons pas là tout un programme. Plutôt une autre musique, l’initiation d’un nouveau rythme en quête de résonances.
Clara Pacquet
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